Taxonomie européenne : de quoi s’agit-il ?

La Taxonomie européenne est une notion relativement nouvelle, qui devient de plus en plus importante dans l’actualité et le fonctionnement des entreprises européennes. HAATCH vous propose de faire la lumière sur son fonctionnement et ses implications.

Pour mieux comprendre dans quelle démarche s’inscrit la Taxonomie européenne, revenons ensemble sur le contexte qui a amené à sa création. Le développement économique et démographique des sociétés a conduit à une croissance des consommations énergétiques et matériels. Celle-ci est à l’origine d’impacts environnementaux négatifs nombreux tels que le changement climatique, la perte de biodiversité ou encore la pollution de l’air, de l’eau et des sols. L’Union européenne, en réaction, s’est fixé des objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La finalité est d’atteindre la « neutralité carbone » à l’horizon 2050, avec un objectif intermédiaire à l’horizon 2030 d’une réduction de 55% des émissions en comparaison avec les niveaux de 1990.

Cependant, l’atteinte de cet objectif a un coût, estimé par les études d’impact à 350 milliards d’euros. A ceux-ci s’ajoutent encore 130 milliards d’euros nécessaires pour réaliser les autres objectifs environnementaux de l’UE tels que la transition vers une économie circulaire ou encore la restauration de la biodiversité et des écosystèmes. Face à ce coût colossal, il est apparu que l’investissement public seul ne permettrait pas de financer cette transition. Il s’avère donc nécessaire que les flux de capitaux privés contribuent à la financer en investissant dans les activités participant à l’atteinte des objectifs. En effet, en encourageant à l’investissement des entreprises dans des activités durables, elles se développeront en nécessitant moins de subvention de l’Union européenne. La Taxonomie européenne lancée en 2018 constitue le premier jalon vers cet objectif.

Mode d’emploi de la Taxonomie européenne

Avant d’encourager à investir dans des activités durables, il est nécessaire de définir des critères pour établir qu’une activité est en effet durable. C’est l’objectif premier de la Taxonomie européenne  c’est-à-dire créer un système de classification des activités afin d’établir les activités considérées comme « durables » d’un point de vue environnemental et social. Par cette Taxonomie, ont été imaginés un cadre et des principes permettant d’évaluer les différentes activités dans leur contribution aux six objectifs environnementaux.

Les six objectifs environnementaux sont les suivants :

  • Atténuation du changement climatique
  • Adaptation au changement climatique
  • Utilisation durable et Protection des ressources aquatiques et marines
  • Transition vers une économie circulaire
  • Prévention et Contrôle de la pollution et Protection
  • Restauration de la biodiversité et des écosystèmes.

Une grille d’évaluation avec des critères techniques a été imaginée pour chaque activité économique afin d’établir leur éventuelle durabilité. Une fois évaluée, une activité est considérée comme durable si elle contribue substantiellement à l’un des six objectifs environnementaux, sans causer un préjudice substantiel à l’un des 5 autres objectifs. A cette dimension environnementale s’ajoute une dimension sociale, qui se traduit dans un ensemble de critères sociaux basiques à respecter pour être considérés comme « durable ». Les différentes activités ayant chacune des spécificités, les critères d’examen ne vont pas être les mêmes pour des activités liées à la mobilité ou à l’énergie. A l’adoption de la Taxonomie européenne en 2020, des critères d’examen techniques ont été imaginés pour 88 activités différentes. Dans la version de 2020, les activités liées au gaz naturel et au nucléaire n’étaient pas inclues dans les activités considérées. Début 2022, elles ont été ajoutées avec leurs propres critères techniques détaillés plus bas dans cet article.

Tour d’horizon des classifications

Jusqu’à présent, seule la classification la plus haute qu’est « durable » a été évoquée, mais il en existe deux autres : les activités « habilitantes » et les activités « transitoires ». Revenons ensemble sur les définitions et des exemples pour chaque classification.

  • Si vous avez bien suivi jusqu’à présent, vous vous souviendrez qu’une activité est « durable » si elle contribue substantiellement à un objectif environnemental de l’UE, sans porter un préjudice à un autre ou plusieurs autres objectifs.
    • Exemple : L’activité de collecte et de transport de déchets non dangereux peut être une activité considérée comme « durable » si elle satisfait aux critères de contribution substantielle suivants :

– les déchets doivent être triés à la source et collectés séparément

– les déchets doivent être destinés à des opérations de réemploi ou bien de recyclage

– l’activité de collecte et de transport de déchets non dangereux doit également ne pas causer de préjudice important à l’un des cinq autres objectifs, tout en respectant les critères sociaux basiques pour être considérée comme « durable ».

  • Seconde classification introduite par la Taxonomie européenne, les activités « habilitantes » sont les activités qui permettent à d’autres activités de contribuer à l’atteinte d’un des six objectifs environnementaux, et peuvent être considérées comme contribuant substantiellement à l’un des six objectifs environnementaux dès lors que ces activités :
    • n’entraînent pas un verrouillage dans des actifs qui compromettent des objectifs environnementaux à long terme, compte tenu de la durée de vie économique de ces actifs
    • ont un impact environnemental positif significatif sur la base de considérations relatives au cycle de vie
    • Exemple : la construction d’infrastructures pour la mobilité des personnes est une activité « habilitante », dès lors qu’elle est destinée à la mobilité active (marche, vélo…), ou bien à la recharge électrique ou le réapprovisionnement en hydrogène.
  • Dernière classification, les activités « transitoires » sont les activités pour lesquelles il n’existe pas d’alternative bas-carbone économiquement ou technologiquement viable, et peuvent être considérées comme contribuant substantiellement à l’atténuation du changement climatique lorsque ces activités :
    • présentent des niveaux d’émission de gaz à effet de serre qui correspondent aux meilleures performances du secteur ou de l’industrie
    • n’entravent pas le développement ni le déploiement de solutions de remplacement sobres en carbone
    • n’entraînent pas un verrouillage des actifs à forte intensité de carbone, compte tenu de la durée de vie économique de ces actifs.

La Taxonomie européenne permet donc d’avoir une grille de lecture des activités selon leur durabilité. Se pose alors la question des mises en application concrètes de la Taxonomie européenne, afin d’orienter plus fortement les investissements vers ces activités.

Mise en application 

Il convient de distinguer les applications obligatoires de la Taxonomie européenne de ses applications volontaires.

Obligatoire :

Les sociétés pour lesquelles la Taxonomie européenne s’applique obligatoirement sont celles déjà tenues de réaliser un reporting extra financier (une extension à toutes les entités d’intérêt public et aux PME cotées est à l’étude). Elles devront publier les informations suivantes :

  • La part de leur chiffre d’affaires provenant de produits ou de services associés à des activités économiques pouvant être considérées comme « durables » (les activités « transitoires » et « habilitantes » sont à distinguer)
  • La part de leurs dépenses d’investissement et la part de leurs dépenses d’exploitation liée à des actifs ou à des processus associés à des activités économiques pouvant être considérées comme « durables » (les activités « transitoires » et « habilitantes » sont à distinguer).

Volontaire :

Au-delà des exigences de reporting obligatoire, le Règlement Taxonomie sera également utilisé de manière volontaire. La Taxonomie a vocation à s’intégrer dans la création de normes et de labels pour les produits financiers « verts ».

Le projet d’Ecolabel vise à labelliser des fonds dont les investissements contribueraient aux objectifs environnementaux tels que définis dans la Taxonomie européenne. Un « score Taxonomie », ou d’alignement avec la Taxonomie, pourrait ainsi être calculé à l’aide de la part de financement des sociétés dont le chiffre d’affaires ou les dépenses d’investissement seront classés comme « durables » par le Règlement Taxonomie. Ce label permettrait donc à un fonds l’obtenant de communiquer de manière tangible sa contribution à la « durabilité » telle que définie par la Taxonomie.

Vers un élargissement de la Taxonomie ?

La question de l’intégration des activités liées au gaz naturel et au nucléaire est le sujet d’âpres débats et de controverses. Finalement, dans la nouvelle classification proposée le 31 décembre 2021, les activités liées au gaz naturel et au nucléaire ont été intégrées :

  • La Commission européenne a intégré plusieurs conditions pour l’électricité nucléaire :
    • Des garanties pour le traitement des déchets nucléaires et le démantèlement des installations
    • Un permis de construire de nouvelles centrales, établi avant 2045
    • La réalisation de travaux pour prolonger la durée de vie des réacteurs avant 2040.
  • Concernant les centrales fonctionnant au gaz, la nouvelle classification établit :
    • Un maximum d’émission de 100g de CO2 par kilowattheure (CO2/kWh)
    • Les centrales ayant obtenu leur permis de construire avant 2030 auront un seuil d’émissions plus élevé, jusqu’à 270g de CO2/kWh
    • Les infrastructures existantes beaucoup plus polluantes (charbon) devront être remplacées et utiliser « au moins 30% de gaz renouvelable ou peu carboné dès 2026 », puis 55% en 2030.

Se pose également la question d’une Taxonomie signalant les activités les plus nuisibles aux objectifs environnementaux de l’Union européenne. En effet, si la Taxonomie européenne promeut l’investissement dans des activités durables, elle n’encourage cependant pas au désinvestissement dans les activités les plus nuisibles reposant par exemple sur l’utilisation d’énergies fossiles. La question d’une Taxonomie européenne signalant les activités les plus nuisibles ainsi que les activités à faible impact environnemental est actuellement à l’étude.

Vous voilà parés pour avoir une lecture sur ce que sont les activités durables, habilitantes et transitoires suite à ce décryptage de la Taxonomie européenne. Les partenariats et l’investissement dans des activités durables en Union européenne ont vocation à prendre de plus en plus de place dans le fonctionnement des entreprises. L’élargissement de la Taxonomie européenne comme évoqué précédemment et l’extension de sa dimension obligatoire à de plus en plus d’entreprises sont des sujets sur lesquels l’Union européenne va légiférer progressivement.

 

 

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